mardi 6 novembre 2018

La Kabbale du Ramhal 2



La Kabbale du Ramh'al (2)

Adam Kadmon (A.K)

 

Ce qui s'est révélé en premier du Tsimtsoum (restriction), de ce H'allal (espace vacant), est cette structure que la Kabbale appelle ''Adam Kadmon'', ''l'homme primordial''.

Selon le Ari, dans ce H'allal, se sont révélées dix Séphirot, dix mesures divines qui sont en parallèle aux dix paroles créatrices. Ces dix Séphirot au départ, étaient dans un ordre appelé ''circulaire''. La lumière ''Kav'' ''rayon'' entre dans cet espace vacant ''H'allal'', en ce courbant selon la forme de cette cavité circulaire. Alors se révèlent les dix Séphirot, l'une dans l'autre comme des pelures d'oignon l'une recouvrant l'autre, jusqu'au point central appelé ''Malkhout'' du monde de la ''Assya'' (monde de l'action), notre monde, comme si tous les mondes se tiennent l'un dans l'autre. Puis ces mêmes Séphirot vont s'ordonner dans ce qui est appelé ''Yocher'', de manière ''droite'', en trois axes, l'axe droit (H'okhma-H'essed-Nestah') gauche (Bina-Guévoura-Hod) et central (Kéter-Daat-Tiphéret-Yessod-Malkhout). Ces trois axes sont la première construction qui s'est révélée dans ce H'allal, de suite après le Tsimtsoum.

La majorité des commentaires du Ari s'occupent de ces Séphirot au niveau de A.K. Cette structure est révélée dans la Torah par le verset « à sa forme et à son image, Dieu a créé l'homme». C'est la première forme des Séphirot structurées en axes ''droite-gauche-centre''. Le Ramh'al la définit ainsi; « c'est le premier ordre que reçoit la lumière émanée pour se tenir dans le mystère des dix Séphirot, dans cette notion de ''structure'' d'homme appelée ''Adam Kadmon'', ''homme primordial''».

Le Ramh'al à ce niveau, ne tient pas compte des Séphirot circulaires qui est la première chose qui s'est révélée d'après le Ari. Cette lumière émanée dont parle le Ramh'al est le Réchimou, la trace de l'infini qui s'est enlevé au moment de la création. Pour le Ramh'al, la création n'est pas uniquement la résultante de l'entrée du Kav dans le H'allal au contraire de l'élève du Ari, Rabbi H'aïm Vital. Le Tsimtsoum est l'A.D.N de toute la création, il est la racine des Séphirot. Il y a deux aspects dans la notion de Séphirot, les notions de Kéli (moyen-réceptacle) et Or (moteur-lumière). Ce qui se révèle est le réceptacle et la lumière est l'âme. Le Réchimou, la trace est la racine du Kéli et le Or est la racine de l'âme. Le premier ordre dans lequel se tient la lumière émanée est le mystère de ce qui est appelé ''la forme de l'homme'' où les dix Séphirot s'ordonnent de manière précise. Au départ, elles étaient l'une sous l'autre ou l'une dans l'autre puis se révèle un autre ordre des Séphirot qui s'appelle la ''forme de l'homme'', qui est la première construction qui va engendrer par un processus d'enchaînement de ces Séphirot, tous les mondes. « Dieu a fait l'homme à sa forme et à son image» de quel homme parle le verset? De cette structure appelée ''l'homme primordial'', ''Adam Kadmon'' qui est construite avec une ''tête'' ''Kéter'' et les deux Moh'in (cerveaux) H'okhma et Bina, une main droite ''H'essed'', une main gauche ''Guévoura'', un buste, ''Tiphéret', deux jambes ''Nestah'-Hod'', l'appareil reproducteur ''Yessod'' et la force d'union qu'est la Malkhout. De cet ordre sont sortis toutes les lois, tous les mondes. C'est une structure constituée de lumières, battît selon le forme d'un homme.

La Kabbale ne va pas s'occuper directement de A.K mais de ses ramifications, des rayonnements qui s'échappent de lui: les lumières des cheveux, des oreilles, des narines, de la bouche, des yeux et du front. Les lumières des yeux sont le principal sujet de discussion comme le verset dit « et Dieu a ''vu'' que c'était bien». Toutes les détériorations et les réparations pour arriver à la perfection vont se faire au niveau des yeux. Ce que le Ari appelle ''la destruction'', la ''mort'', la ''brisure des vases'', va se réaliser au niveau de ces ''yeux''. Les lumières des yeux sont englobées dans ce qui est appelé le ''monde du chaos''. Dans ce niveau des ''yeux'', le Or et le Kéli sont séparés, le Kéli devient alors autonome et le Or se tient autour et attend que le Kéli le recherche afin de s'unir à lui.

Dans le monde du Tikoun, de la réparation, il y a un lien qui se fait petit à petit entre le Or et le Kéli qui n'est pas permanent. Ce n'est qu'au niveau du monde appelé ''monde futur'' qu'il y aura véritablement un lien continuel entre le Or et le Kéli, entre la lumière et le réceptacle, entre l'âme et le corps. Alors la création arrivera à la perfection.

En résumé, il y a les ramifications de A.K: du haut vers le bas, les lumières des cheveux, des oreilles, des narines, de la bouche. Toutes ces lumières ne sont pas perceptibles ce qui n'est pas le cas à partir des lumières des yeux qui sont le ''démarreur'' de toute la création. À ce moment le monde est chaos, c'est le règne des rois primordiaux, le règne des Kélim, des réceptacles, de ces sept forces inférieures.

Au niveau des lumières des yeux, il y a une domination des Kélim, où se révèle la séparation de l'ustensile (qui est aussi de la lumière mais dépourvue de son infinitude) et de la lumière. C'est cette séparation qui engendre la création car tant que le Kéli est englobé dans le Or, la création est avalée par le divin. Ce n'est que lorsque la lumière infinie se sépare de cette lumière altérée de son infinitude qu'il y a possibilité à la création de se révéler. La brisure d'après le Ramh'al, n'est pas une destruction mais le moyen de révéler la création. Les réceptacles sont eux-mêmes les lois de la créations qui ont alors une autonomie et ce n'est qu'à ce moment que nous pouvons parler de création car à ce moment la lumière est séparée de sa source d'émanation.

Le Ari parle à ce niveau d'une destruction, la brisure n'étant pas uniquement une séparation amenant à une révélation de la création mais aussi une destruction. Cette destruction amène au monde des ''points'' où va se révéler le mal ontologique qui va se transformer en monde de la ''réparation'', du ''Tikoun''. Ce monde étant un processus qui va amener l'union du Or et du Kéli, de l'âme et du corps. Ce monde est appelé le monde de la ''Atsilout'', de l'émanation qui va diriger et agir dans la création pour amener celle-ci à la réparation.

 

Adam Kadmon a deux sortes de ramification. 1/ les lumières des ''oreilles-narines-bouche'' 2/ les lumières des yeux qui vont amener une nouvelle réalité, la réalité des êtres séparés par la séparation du Or et du Kéli. C'est ce qui est appelé la ''brisure des vases'' qui se situe au niveaux des lumières des yeux.

L'union du Kav, du rayon avec le Réchimou, la trace de l'infini, est faite dans cette structure appelée ''Adam Kadmon''. Il y a alors déjà révélation et dissimulation. La révélation se fait par l'introduction de la lumière infinie qui s'épanche dans le H'allal et la dissimulation se fait par le Réchimou. L'union de ces deux états engendre l'âme et le corps. Tout le rayonnement de Adam Kadmon n'est que la révélation de cette union de ces deux états: intériorité et extériorité, révélation et dissimulation. Ce rayonnement donc de la ''face'' de A.K est la résultante de cette union du Or et du Kéli. Il se trouve donc que ces lumières qui sont dévolues à sortir de cette face de A.K, sont l'expression de ces unions du Kav et du Réchimou, du Or et du Kéli, de l'âme et du corps.

Cette situation des lumières des yeux qui entraîne une autonomie du corps, est fait allusion dans ce verset: « moi et lui ne pouvons résider dans un même endroit».

Les lumières des cheveux qui se sont révélées en premier, est comme le mystère du Kéter dont il est impossible de parler au contraire des lumières des ''oreilles-narines-bouche'' dont il est déjà possible de parler. Des lumières des oreilles, se révèle la lettre ה, des lumières des narines, se révèle la

lettre ו, des lumières de la bouche se révèle la lettre ד et ensuite toutes les autres lettres. Au niveau de la bouche se révèlent en fait toutes les 22 lettres de la création car c'est à ce niveau que se révèle le Kéli.

Que se révèlent alors dans ces lumières des narines et des oreilles? Il faut savoir que les lettres sont en fait les Kélim. La pensée est le secret des Séphirot et la parole comme le moyen d'exprimer cette pensée. En fait, le Kéli est l'action, il est le moyen de sortir en acte la pensée. Chez le Ramh'al, le Kéli n'est pas uniquement un réceptacle mais cela est surtout une action. Donc, les lettres qui expriment la parole sont les Kélim de la pensée. Au niveau des lumières des oreilles de A.K, il y a déjà une expression du Kéli, c'est la première expression de la pensée qui sort en acte mais de manière très subtile, où il n'y a qu'une seule lettre. Ce n'est qu'au niveau des lumières de la bouche qu'il y a l'expression complète du Kéli par la sortie en acte des 22 lettres de l'alphabet. Il y a alors la possibilité de donner une forme à toute pensée possible. Ce qui n'est pas le cas au niveau des narines et des oreilles où le Kéli est alors restreint à sa forme la plus simple.

Au niveau des narines, il y a donc la lettre ו(en vérité il s'agit de ו xא) et au niveau de la bouche, s'expriment toutes les lettre. Quelle différence y a t-il entre ces deux niveaux de lumière? En vérité tout découle de la lettre ה du niveau des oreilles qui se sépare en ו au niveau des narines plus le דau niveau de la bouche (la lettre ה peut se décomposer enד ו). au niveau des oreilles, les lumières droite et gauche qui sont appelées ''englobante'' et ''intérieure'', étaient éloignées l'une de l'autre. Dans les narines, elles se rapprochent et dans la bouche, elles s'unissent et alors se révèle le Kéli.

Comment cette union des deux sortes de lumières que sont les ''englobantes'' et les ''intérieures'' peuvent révéler le Kéli? En vérité, à l'intérieur même de la lumière, il y a cette notion appelée ''Kéli''. Celui-ci est avalé à l'intérieur du Or. Dans les lumières des cheveux, le Kéli est tellement avalé qu'il est complètement annulé, n'ayant aucune réalité pouvant être défini par une qualité ou par une lettre. Bien que nous pourrions le définir à ce niveau par la lettreי, mais cela n'est pas écrit dans les livres, nous ne pouvons alors pas affirmer ceci. Malgré tout, il y a certaines allusions faisant référence au Kéter et à la H'okhma alors que les oreilles font référence à la Bina.

Dans A.K, il y a déjà une certaine matérialisation de la droite et de la gauche, ce qui n'est pas le cas au niveau du Tsimtsoum, où les Séphirot se révèlent en cercles où il n'y a ni droite ni gauche.

Et donc, le Kéli pour le Ramh'al ne se crée pas au niveau de la bouche, ex-nihilo mais il se révèle petit à petit à partir des lumières des oreilles. Car le simple fait de définir ces lumières en ''Makif'' et ''Pénimi'', sont le signe d'une création, d'un Kéli où il y a un contour ''Makif'' et un volume ''Pénimi''. Bien que le Kéli à ce niveau est virtuel mais ces lumières sont la preuve de son existence. Nous comprenons que le corps qui est un engendrement du Kéli, n'est pas insignifiant, il ne provient pas que de la poussière de la terre, sa source est divine. Il est d'un niveau extrême qui révèle aussi le Or. Ce n'est pas la lumière qui révèle le réceptacle mais bien le contraire, c'est le Kéli qui révèle le Or.

Au départ, le Makif et le Pénimi au niveau des oreilles, sont éloignés l'un de l'autre. Cette expression ''éloignés'' ne définit pas une notion d'espace car à ce niveau, il n'y a pas encore la notion d'espace-temps. Cela veut plutôt dire que le Kéli ne peut être saisi à ce niveau car son contour et son volume sont ''éloignées'' l'un de l'autre. Cette notion de droite et de gauche au niveau des oreilles est effectivement le commencement de la création mais pas comme nous la connaissons. C'est un niveau de perception de l'unité divine extrême, de même que les lumières des narines et de la bouche, dans un niveau moindre. Tous ces niveaux sont tout de même des niveaux dans la création qui amènent au rapprochement et à l'adhésion à l'unité divine qui est l'intériorité même de Adam Kadmon. Ces lumières des oreilles-narines-bouche sont déjà des ramifications du temps, des échelons qui amènent à l'autonomie du corps, à la rencontre de la révélation du corps.

Pour le Ari, ces lumières des oreilles-narines-bouche ne sont mentionnées que pour une seule chose, la révélation du Kéli. Pour le Ramh'al, elles sont aussi des moyens de s'élever, elle révèlent des niveaux d'adhésion divine du monde futur. Il y a une élévation dans la perception divine même dans le monde futur qui correspond aux septième, huitième, neuvième et dixième millénaire. Ce dixième millénaire étant le niveau des lumières des cheveux où il n'y a pas la moindre trace du corps.

Les lumières de la bouche sont considérées comme la révélation du Kéli. Comment le Kéli se révèle des lumières de ce niveau? Par le retour des lumières à leur source comme il est dit: ''la lumière ne se parfait et ne se révèle que par son retour''. La lumière ''sort'' de la bouche et ne se parfait que par son retour à l'intérieur de la bouche. C'est ce qui est appelé ''Or H'ozer'' ''le retour de la lumière''. Il y a un ''or Yachar'' ''lumière sortante'' et un ''Or H'ozer'' ''une lumière revenant à sa source''. Cette ''sortie'' et ce ''retour'' à sa source sont en fait les deux éléments du principe même de la révélation du Kéli. Sa source est à l'intérieur de A.K et ce n'est que sa révélation qui se fait par la sortie.

Le Réchimou est la trace de la lumière alors que le Kéli est une révélation de cette lumière par une action. Le Kéli est cette trace de la lumière qui se révèle, il est lui-même la lumière qui provient de cette restriction de l'infini. Le Kéli est une trace de la lumière infinie, il n'est que le contour de cette lumière qui va délimiter l'action. Tout forme définit une action: en voyant un crayon, nous comprenons sa fonction. Nous voyons bien que l'action révèle la pensée. La trace de la lumière, le Réchimou du Or, est en fait l'expression de cette même lumière. Ce n'est que par le fait que la lumière sorte en laissant sa partie grossière et en faisant revenir à l'intérieur sa partie fine que le Kéli se révèle. La partie grossière est la forme qui se révèle à l'extérieur et la partie fine qui est l'âme du Kéli retourne à l'intérieur. Ce Kéli à ce niveau de révélation n'a aucune autonomie, ce Réchimou n'a alors aucune réalité propre. Il n'a de réalité uniquement parce que le Or rayonne sur lui.

En vérité, le Réchimou n'est pas qu'une simple trace de ce qu'il y avait mais l'histoire de tout ce qu'il va se passer dans la création. Le Réchimou est une trace qui va petit à petit se révéler en des temps précis et amener cette même création à la perfection où le Kéli va revenir à sa source qui est le Or infini. Le Kéli ne se révèle que par la matérialisation d'un manque et plus le manque va se compléter plus le Kéli va revenir à sa forme fine qu'est la lumière. Dans le temps, le Kéli n'est que la matérialisation d'une partie de ce Réchimou qui doit alors se révéler pour exprimer son manque. Le corps en soit est une partie du Réchimou qui va en se complétant pour adhérer à la lumière.

Rav Mordékhaï Chriqui

 

 

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