Biographie-Son Oeuvre



Ram’hal,initiales de Rabbi Moché ‘Haïm Luzzatto est sans aucun doute l'un des maîtres les plus prolifiques et les plus innovateurs que le Judaïsme ait connu. Kabbaliste et logicien, talmudiste et poète, moraliste et grammairien, théologien et dramaturge – telles sont les facettes apparemment antinomiques de la personnalité exceptionnellement riche de ce géant de la Tora. 

Mais le Ram’hal est d'abord le plus grand érudit de la Kabbala, après le Arizal, qui a pensé la véritable dimension ésotérique en termes rationnels. Ainsi, il a clairement défini les fondements authentiques de la foi juive à partir de la Kabbala (Dérèkh Hachèm - La voie de D.). 
Rabbi Moché ‘Haïm Luzzatto naît dans le ghetto de la ville italienne de Padoue en 1707. Son père lui donne deux maîtres : Rabbi Icha’ya Bassane pour le Talmud et la Kabbala et Rabbi Its’hak ‘Haïm Cantarini pour la culture universelle. 

La Kabbala de Rabbi Its’hak Louria avait influencé les communautés juives d'Italie, mais le Chabtaïsmeavait détérioré les rapports entre juifs et la tradition orthodoxe. 

Rabbi Yossef Halévi de Livourne parla en public: « le repentir, c'est rendre à son prochain son bien, s'abstenir du vin des gentils et de raser les péote ; ne pas s'associer à des femmes étrangères ». 

Cela déplut à la grande masse, car ils croyaient fermement que celui qui croyait fermement en Chabtaï Tsvi était sauvé ; tout le monde croyait en cette hérésie comme si c'était la loi de Moché. 

La faillite du Chabtaïsme provoqua une grande méfiance envers les courants messianiques. Certains Rabbanim accuseront la propagation de la Kabbala qui était à leurs yeux comme la cause de la catastrophe. 


Quelle utilité tire-t-on de ces connaissances ? « La foi dans l'unité du Créateur que partage toute l'assemblée de la communauté d'Israël, dans le fait qu'il dirige son monde, qu'il nous a donné sa Tora et que notre Machia’h viendra est bonne. On n'a guère besoin des notions étranges forgées par la Kabbala, les Séfirote, qui n'engendrent que de l'embarras ». 
Le Ram’hal avait à peine 14 ans qu'il connaissait déjà toute la Kabbala du Arizal (Rabbi Its’hak Louria) par cœur, et personne, pas même ses parents n'étaient au courant. 

Le jeune Ram’halforma des cercles d'étude dont le but était de communiquer le désir profond de la Guéoula. Le but du cercle formé était d'étudier continuellement le Zohar. D'autre part, le voyage du Ram’hal dans la "vallée des secrets" aboutit à une expérience décisive. 

La révélation du Maguid (narrateur céleste) qui joue un si grand rôle dans la littérature kabbalistique qui lui dicte le Zohar Tinyana ou le (second) Zohar de la rédemption. Le Ram’hal a alors 20 ans, et affirme lui même : Je ne le vois pas (le Maguid) mais j'entends sa voix qui parle par ma bouche. A l'instar de Rabbi Chimon Bar Yohaï – le maître du Zohar, le Ram’hal s'impose dès l'âge de vingt ans dans le monde Toranique. Pourtant, en 1730, sous la pression des sages, hantés par l'idée du "faux messie", le Ram’hal accepte de signer un aveu, sur le conseil de son maître, Rabbi Icha’ya Bassane. 

Cet aveu stipule l'interdiction d'écrire les secrets ou les révélations sous la forme araméenne du Zohar. La signature de l'aveu n'apaise pas les détracteurs du Ram’hal, et les attaques se poursuivent sans répit. 

Il va vite susciterl'opposition de Rav Moché ‘Haguiz d'Altona-Hambourg. Ce dernier était un farouche adversaire des Chabtaïstes et est scandalisé par l'hérésie qu'il croit déceler dans ce groupe d'Italie

" Vous montagnes d'Israël, mes maîtres, enquêtez afin de déraciner ce groupe pervers avant qu'il ne propage sa perversité parmi les multitudes ignorantes". Mais son maître et ami Rabbi Icha’ya Bassane semble avoir des doutes et lui fait remarquer: « Il semble difficile d'admettre que tu en reviennes toujours aux sujets d'ordre messianique. 


En effet, tel est l'un des signes les plus évidents de la nature mauvaise du Maguid, puisque les forces mauvaises ont pris l'habitude d'embarrasser les esprits avec les choses messianiques afin de faire trébucher Israël ». 
A cette époque le Ram’hal épouse Tsipora, fille de David Finzi, éminent érudit de Padoue. Cela lui permet de se soustraire aux soupçons qu'un homme de 33 ans ne soit pas marié. 

En dépit de cet acte, la suspicion des Rabbanim reste. Il se maria en 1731 et comme suite à une série de calomnies (afin de le déstabiliser) fatigué de mener une guerre qui n'en finissait plus, en 1735 le Ram’hal décide de quitter l'Italie à la recherche d'une vie sereine vers la Hollande. 


En 1743 il décide de réaliser ce vieux rêve: La montée en Israël. Cette même année il est à Acco près de Tibériade et de Safed.  

Le Gaone de Vilna fut un des admirateurs du Ram’hal, tant en matière de Kabbala que d'éthique pour son livre "les sentiers de la rectitude". Le Gaone aurait revêtu des habits de fête pour célébrer l'acquisition du manuscrit "Adir Bamarom" du Ram’hal. 

On attribue au Maguid de Meseritch la remarque que la génération ne fut pas digne de comprendre la piété et l'ascèse du Ram’hal. Un sage d'Israël, Rabbi David HaKohen écrivait : « Ces trois courants de pensées ('Hassidim - Mitnagdim - Haskala) trouvent leurs racines dans l'âme du Ram’hal.  


Depuis Rabbi Chim’one Bar Yohaï, la priorité à l'étude du Zohar était donnée au Ma’assé Beréchit(la genèse). Après l'exode d'Espagne en 1492, il faut mobiliser et libérer toutes les forces capables de "précipiter le A’harite Hayamim". Mais la fin (A’harite) est contenue dans le Réchite (début). La lumière cachée dans le Réchite (lumière du Machia’h) se révélera dans le A’harite. Pour le Ram’hal, le Zohar serait donc le moyen, la clé de la rédemption et de la venue du Machia’h 

Au cours d'une épidémie lui et sa famille sont décimés en 1746. Certains pensent qu'il fut enterré à Kfar Yassif près de Acco et d'autres pensent qu'il fut enterré à Tibériade où sa tombe est proche de celle de Rabbi ‘Akiba. Celui-ci a commencé à étudier à l’âge de 40 ans et a vécu jusqu'à 120 ans, alors que le Ram’hal a terminé la sienne à 39 ans. 


Tout porte à croire qu’il a complété la vie de Rabbi ‘Akiba, celui pour qui Moché Rabbénou avait envié son sort. De même que la tombe de Moché n'est pas connue, de même celle du Ram’hal n'est pas connue avec certitude. Qui plus est, comme Moché Rabbénou avait fait 515 prières pour pouvoir rentrer en Terre Sainte, le Ram’hal en fit de même. 



Le Ramh'al et son œuvre (deuxième partie): La cause et le but

Le Ramh'al va utiliser la logique pour comprendre l'enseignement de la Kabbala. On a trop souvent vu le Ramh'al comme un savant et comme un philosophe et donc comme un chercheur qui n'a que des buts spéculatifs, préoccupé uniquement à donner au monde une représentation intelligible en occultant le caractère pratique. Chez tous les mystiques d'ailleurs, il y a cette tendance à développer cette faculté imaginative mais non de manière ordonnée, ne retransmettant que ce qu'il reçoit du divin. Pour cette raison, le Ramh'al va écrire un livre qui va édicter les règles du raisonnement d'où procède tout argumentation. Bien que la Kabbala est un enseignement caché et donc qui ne respecte pas apparemment ces règles du raisonnement, le Ramh'al va réussir à révéler que la Kabbala respecte ces règles. La logique pour le Ramh'al est un outil, un moyen et non un but comme une partie de la philosophie. La logique va être utilisée comme instrument dans le domaine de la métaphysique qui dans toutes les traditions, ne respecte pas justement cette argumentation même si parfois, il y a une structure mais sans respecter réellement les règles de l'argumentation.
Il y a des modes de pensées et des modes d'existences. Tous les mots venant exprimer soit des modes de pensée soit des modes d'existence. Il y a dix catégories d'expression pour atteindre la source des transpositions. Le Ramh'al dit que tout être peut être défini par les dix catégories du philosophe:
1/ la substance 2/ la quantité 3/ la qualité 4/ la relation 5/ l'action 6/ la passion 7/ le lieu 8/ le temps 9/ la situation 10/ la possession. Tout peut être inséré à travers ces dix concepts. Le Ramh'al va développer 22 termes pour définir les choses: la cause et l'effet, le sujet et l'adjectif, le tout et le détail, la racine et la ramification, la définition et le défini, l’étymologie et l'issue de l'étymologie, la division et le divisé, l'équivalent et le divergeant, les opposés, le témoin et le témoigné, le genre et l'espèce.
nous allons nous attarder sur les notions de cause et effet et de définition et défini. L'erreur des philosophes est de considérer le détail plus que la généralité dans un texte de Kabbala. Il faut donc savoir distinguer où est la généralité et où est le détail, rechercher la source, le fondement, la racine. Et sans la recherche de cette distinction, on en arrive à tout confondre et faire de graves erreurs dans ces notions très profondes de la métaphysique.
Nous allons parler tout d'abord de la cause qui enferme la fin de tout « le commencement raconte la fin», cela veut dire que dans le début, il y a déjà la fin. Et par cela, la voie prophétique peut se réaliser car nous voyons une chose en entrant dans cet espace ''global'' où tout y est inséré, le début et aussi la fin. De même par la véritable sagesse sans passer par la prophétie, le sage peut lui-aussi comprendre la fin dans ce début. En vérité, la cause est égale au but car devant l'éternel, il n'y a aucun changement et le début et la fin ne sont qu'une seule et même volonté immuable. Même s'il y a des subtilités pour discerner au niveau de l'unité de Dieu avant la création (« tu es UN avant la création du monde» le UN qui n'est pas ce qui précède le multiple mais qui contient le multiple) et le UN qui se révélera à la fin des temps devant la communauté des hommes parfaits qui vont se dresser devant cette unité et connaîtront alors cette unité. Quelle est la différence entre cette unité primordiale et cette unité finale qui vient à la fin des temps? Il n'y a pas réellement de différence, la différence ne se trouve que dans la voie qui mène depuis la première révélation que l'on appelle le ''Tsimtsoum'', la ''dissimulation'' qui est la révélation de la création du monde qui est une véritable révélation de Dieu. C'est la révélation de la trace de sa lumière qui va mener à la création de tous ces mondes et de la période des 6 000 ans que l'on appelle la période du milieu entre la période du UN primordial et du UN révélé à la fin de ces 6 000 ans aux yeux de tous.
Selon le livre de la création, l'existence se divise en trois domaines qui sont ''l'espace, le temps et l'être'' qui peuvent être définis ainsi ''Dieu en tant que créateur (l'espace), le monde (le temps-les 6 000 ans) et l'être (l'homme)'', Dieu, l'histoire et l'homme.il y a donc l'être transcendant qui reste UN même après la création, il y a la création, notre univers et enfin l'homme qui est composite et contient aussi bien la plus basse des matières et la plus subtile de l'étincelle divine.
Il faut comprendre le but de l'homme, le but de la création et le but de la volonté divine (et non le but de Dieu). Ceux qui considèrent la création comme un but se pourvoient car la création n'est pas un but. Dans sa jeunesse, le Ramh'al s'intéressait uniquement à l'au-delà de l'entendement pour à la fin de sa vie, rencontrer l'homme qui corrompt ses voies par la perception des sens. Il va alors dans son livre ''la voie des justes'' explique quel est le but de l'homme car lui aussi a un but dans sa vie. Sans but, l'homme va à sa perte. En vérité, le but de l'homme est de retourner à sa cause car le but et la cause ne sont qu'un. La cause étant le fondement du service divin qui est aussi son but. L'homme a été créé pour le plaisir issu de la proximité divine. Il a été créé pour se délecter de la présence divine. La première action du premier homme a été la recherche du plaisir par la consommation du fruit de l'arbre de la connaissance comme il est écrit:« c'est une envie des yeux» qui est un plaisir intellectuel qui va permettre à l'homme de devenir ''libre'' dans son choix. Car l'homme dans sa nature veut être libre et autonome et donc il convoite ce plaisir de réfléchir, de choisir surtout et de décider ce qui est bon et ce qui est mauvais. Il n'y a plus alors la perception du vrai et du faux mais une perception subjective du bien et du mal. Sans éclaircir le but de l'homme, alors celui-ci va se noyer dans les délectations de ce monde. Notre délectation doit être attaché à la cause première qui est la volonté divine. C'est en atteignant la proximité de la présence divine que l'on atteint cette véritable délectation. Cette proximité va s'atteindre par la recherche de la crainte de Dieu, de l'amour divin, par la pureté de la pensée. Rechercher et révéler en nous non pas la crainte de la punition mais la crainte révérencielle qui est en vérité la conséquence de la présence divine en nous. Le but de l'homme idéal est la recherche de la présence divine, de l'adhésion à Dieu. Les Mitsvot vont être le moyen de cette adhésion. Ces Mitsvot peuvent être perçues elles-aussi soit de manière particulière et donc, on va essayer de les appliquer de manière rigoureuse mais cela peut avoir pour conséquence d'oublier qu'elles sont en vérité des moyens pour revenir à l'unité divine. Ceci ne peut se faire qu'en ramenant ces Mitsvot à leur globalité qui est l'adhésion. Chacune des Mitsvot est un conseil, un moyen pour exprimer sa foi et sa relation avec Dieu. En utilisant les Mitsvot comme un but, on limite leur pouvoir de réinsertion dans la globalité du UN car le secondaire est devenu l'essentiel. C'est le principe de la globalité et du détail. Il faut arrêter de voir les Mitsvot comme des détails. De même, le Ramh'al explique qu'il ne s'occupe pas dans l'étude de la Kabbala, des détails mais qu'il recherche toujours le principe général dans son étude car les détails vont alors se retrouver automatiquement dans ce principe général. Ce principe doit aussi être un principe universel qui englobe tous les détails. C'est cela la différence entre l'exotérisme et l'ésotérisme, la Kabbala va aller dans l'essentiel, dans le principe universel de la Torah alors que l'étude exotérique va plutôt s'attarder aux détails de la Torah. Ainsi dans le travail des qualités, certains vont travailler une qualité spécifique comme par exemple, l'humilité qui il est vrai, incarne une vertu exceptionnelle. En étant humble, l'homme va être aimé des autres mais est-ce suffisant? Est-ce le but de notre service divin? Il y a quelque chose qui nous dépasse dans notre service qui n'est plus de l'ordre de la singularité et qu'il faut à tout prix atteindre. Ce but est la droiture dans son comportement qui va elle, engendrer nombre de qualités comportementales. La droiture ne va pas faire de concession, l'homme ne va pas alors transiger pour aller à droite ou à gauche. Ce but à atteindre qu'est la droiture va le déconnecter de toute attirance aux envies de cette vie matérielle. Ce but va alors animer la vie de l'homme, ce but qui en vérité est l'origine.
De même, la création et toute créature doivent avoir un but qui est en fait leur origine. La création en elle-même n'est pas un but. Le but de la création est la délectation et donc la création est le moyen pour arriver à cette délectation. Notre but sur cette terre est d'arriver à la délectation du divin qui se matérialise par le dévoilement de l'unité de la création. Notre corps et notre âme sont les moyens pour l'atteindre. Ne nous trompons pas de but. Tout notre être n'est qu'un moyen qui va permettre à Dieu d'atteindre l'objectif de sa volonté qui est aussi son origine, sa révélation de manière effective.
Ceux qui font de la cosmogonie et de la Kabbala, une recherche spécifique pour amener à une connaissance de la création, pensent que la création est un but en elle-même. Et cela est faux, la création n'est pas un but mais un moyen qui va aider à retrouver la cause originelle et efficiente. La recherche de l'être suprême est le véritable but de toute créature. L'homme étant à l'image de Dieu, pour cette raison, toute la création est tournée vers l'homme et son but qu'est la délectation de la présence divine.
L’ascèse n'a pas pour but de se retirer du monde mais d'utiliser les plaisirs du monde et leur donner un sens qui est la recherche du divin et de leur origine. Le plaisir n'est pas un accident, n'est pas la conséquence d'une pulsion du corps qui lui, maintient l'âme dans une sorte de prison construite par ses sens. Le plaisir lorsqu'il est transcendé, amène l'homme à se surpasser et a se réinsérer dans son origine divine. Mais il est vrai que pour transcender ce plaisir, il faut d'abord le dominer, le dompter et l'éduquer.
Le véritable but de la volonté de la création est la plénitude du sans-fin qui est aussi son origine. Le bienfait qui est la conséquence de la création tire sa source de l'éternité de l'infini et le but de cette création est la révélation de son unité. Il y a donc trois buts: le but de la création, le but de l'homme et le but de la volonté divine. Le but de l'homme est d'atteindre le plaisir infini, le plaisir sans fin car non-issu du fini et de ses contraires dont le référant est la souffrance. C'est le plaisir issu de l'origine elle-même du sans-fin. De même, le but de la création est de rejoindre cette origine infinie et tous les événements de l'histoire concourent à rejoindre cette cause et le bienfait qui en découle. Toutes les découvertes tout d'abord des sagesses puis des sciences ne sont là que pour dévoiler justement ce bienfait infini. Ce Bien est en fait la révélation de l'unité qui est elle-même le but de la volonté divine. Et donc nous voyons que le but de la création de l'homme et de la volonté ne change pas et est le même.
Rav Mordékhaï Chriqui


L'allégorie et son interprétation (3)
Le Ramh'al a apparemment été perçu par les chercheurs et les académiciens comme l'interprète de l'enseignement du Ari Zal. Le Ramh'al est un des rares sages qui a compris l'allégorie des écrits du Ari Zal car il faut comprendre ses enseignements comme des allégories et ne pas les saisir tels qu'ils sont transmis. L'allégorie étant une image qui veut signifier ce qui était insignifiant et donc elle donne la possibilité au lecteur de comprendre quelque chose qui jusqu'alors lui échappait.
Lorsque l'on parle des principes premiers, des lois anthologiques, Dieu fixe en même temps le principe de la perception afin que le prophète qui est l'homme parfait soit capable de percevoir et de comprendre chacune des Séphirot qu'il appelle les ''mesures''. Il comprend chaque force par la faculté imaginative. C'est une force de l'intellect qui permet de créer et de percevoir la forme. Et donc au moment où l'illumination prophétique apparaît, sa signification se grave dans son cœur. Car en vérité, ce qu'il perçoit n'a pas de forme, est indéfinissable. L'exemple du lion qui est la forme que la faculté imaginative va retenir mais derrière cette image, il y a une interprétation que l'homme va saisir dans son cœur car en même temps qu'il voit l'image, il perçoit son interprétation. Et cette interprétation est nécessaire car si la Séphira telle que le H'essed qui s'exprime par l'eau ou par la couleur blanche ou par l'argent ou par la bonté, avait en elle cette vision inhérente à elle, alors les prophètes auraient eu à comprendre sa nature intrinsèque. Et puisque la vision procède de la volonté de Dieu et non de l'essence séphirotique cela veut dire que l'image ne se trouve pas dans la Séphira mais dans la volonté. Pour cette raison, le prophète peut percevoir une image avec la perception de la Séphira mais cette image ne se trouve pas dans la lumière de la Séphira. Cette image est liée à une volonté que l'éternel veut montrer, veut expliquer et veut transmettre. L'image n'est donc pas essentielle mais extérieure à la Séphira. Il y a donc le principe lui-même et la volonté divine qui s'insère en lui. Dieu veut faire visualiser les lois de la conduite divine dans ce monde. Chaque forme qui existe a une réalité bien sûr dans la direction divine mais elle a aussi son expression dans le monde des images, le monde de la réalité que nous percevons par nos sens.
C'est tout le travail du Ramh'al de rentrer dans l'interprétation de l'image et non de rester dans cette image tels que le cercle ou le trait...le Ramh'al dit que les Séphorot ne sont pas que des métaphores, ne représentant que des images que l'on utilise pour expliquer quelque chose. Il s'agit bel et bien d'une réalité concrète qui existe mais qui n'a pas la même valeur ou la même image que les formes et les images des mondes inférieurs. Dans ce monde, il y a des réalités et des formes qui proviennent de ces Séphirot mais dans les mondes supérieurs, ce sont des lois réelles et non abstraites qui sont aussi à l'origine dans ce monde des créatures tels que le soleil, la lune et les étoiles, les anges ou les animaux. Tous les existants procèdent d'une seule source que l'on appelle les ''émanations'' ou ''Séphirot'' ou ''principes premiers'' ou ''lois anthologiques''. Le Ramh'al écrit ainsi: « les Séphirot peuvent être perçues par le prophète selon de nombreuses formes ou images mais ces formes ne sont pas les Séphirot elles-mêmes». Moshé lui-même met en garde le peuple d'Israël sur ces images prophétiques qui ont été perçues au mont Sinaï. Il faut oublier l'image qui véhiculait le message et ne garder que le sens de l'image. Nous ne parlons pas des Séphirot qui proviennent elles, directement de la pensée divine dans laquelle on ne peut discerner la moindre forme puisque Dieu est dissocié de toute contingence matérielle au contraire de ses créatures qui elles, y sont soumises. Ainsi lorsque dans les écrits du Ari, il est mentionné la petitesses ''katnout'', la grandeur ''gadlout'', le petit visage ''Zéïr Anpin'', le grand visage ''Arikh' Anpin'', les montées et les descentes des Séphirot, ce ne sont que des métaphores qu'il faut donc interpréter. Il est inconcevable qu'il s'agisse de la réalité objective des séphirot mais il n'est pas non plus concevable de considérer ses expressions comme de simples allégories ou comme des allusions relatives à des directions divines et à ses principes. Ce ne sont pas donc des allégories ou des métaphores déconnectées complètement de la réalité car sinon, toute la substance de l'enseignement lui est retirée. Tous ces textes ne sont pas que de l'ordre de la symbolique mais ces symboles sont un besoin pour cacher les secrets de la Torah.
Il existe deux genres de paradigme, l'un vrai et l'autre faux. Le vrai correspond a un événement qui a existé, le faux a été inventé proche de la vérité et même s'il n'a pas existé, le maître va l'utiliser pour donner vie à son enseignement et expliquer quelque chose qui est apparemment insaisissable. Le vrai paradigme se trouve dans la prophétie de Ézéquiel lorsqu'il rapporte le thème de la résurrection en décrivant sa vision des os desséchés qui vont reprendre vie. Ces os desséchés représentent Israël qui ont abandonné la connaissance vraie de la Kabbala. Donc cette métaphore correspond à quelque chose de réel. Il y a donc aussi une allégorie qui est dans l'exemple et non dans le vrai .
La Kabbala parle effectivement sous forme rhétorique et donc sous forme d'images, ce ne sont pas de fausses métaphores mais de véritables images. La connexion, la relation qui existe entre l'image qui est perçue par le prophète et la réalité est très forte et très puissante. Le Ramh'al va jusqu'à dire que l'image elle-même est engendrée par le principe qui lui, est divin, qui est une mesure, une loi, une expression de la divinité. Ce principe va prendre sa place et sa forme dans les palais (qui sont aussi une image d'un autre principe mettant en forme l'expression divine). La lumière divine qui est ce principe va entrer dans le palais pour prendre une autre forme qui n'est pas de l'ordre de la première forme anthologique et qui est donc insaisissable. Cette lumière ne peut s'exprimer qu'en passant soit par la faculté imaginative du prophète soit par l'étape appelée '' palais''.
Une autre allégorie dans le Ari Zal que le Ramh'al va décoder: l'infini! Quelle est la nature de cette chose que l'on défini comme sans fin? À priori, cela fait référence à la nature même de Dieu et donc insaisissable. Il n'y a qu'une seule chose que nous savons, c'est qu'il s'épanche sans fin. Pour le Ramh'al, cette notion d'infini représente la souveraineté absolue de Dieu et son unité et qui donc ne définit pas en vérité l'essence divine. Car son essence ne peut être saisie par aucune définition. Aucun mot ni aucune lettre ne peuvent le saisir. Nous ne pouvons parler de son essence que par des termes négatifs tels que ''il n'est pas....''. Pour le Ramh'al, lorsque nous parlons de l'infini, nous ne parlons que de son action qui va être l'expression de la plénitude et de la perfection sans fin.
Ainsi pour la définition du ''Tsimtsoum'', de la restriction anthologique, nous ne pouvons comprendre textuellement cette expression car Dieu ne se retire jamais, il est omniprésent. Le fait de définir la restriction telle que nous la concevons est le fait de notre réalité personnelle car nous avons besoin de la rhétorique pour comprendre l'acte divin. Pour le Ramh'al, le Tsimtsoum est dans le fait de retirer l'infinitude de son acte et pour cela, cet acte divin qui est infini va se révéler par un phénomène de gradation. Cette gradation est la révélation même de l'acte infini. Cette gradation se révèle par les mesures, c'est alors la révélation des Séphirot qui sont ces mêmes principes qui vont limiter cet infini. Car ce n'est que grâce au Tsimtsoum que les Séphirot se révèlent. Les Séphirot sont des forces, des lois, des principes qui suivent une évolution. Ces Séphirot vont épancher la puissance divine par gradation, de la puissance la plus extrême jusqu'à une puissance moindre. Et donc par le Tsimtsoum, Dieu retire non pas son essence mais l'infinitude d'un acte de manière progressive. Il réduit alors l'expression de ce qu'il veut bien transmettre. Alors il est possible de parler des Séphirot comme il est dit: « par dix paroles, Dieu a créé le monde». Les Séphirot étant une énumération de forces, de lois de la création et de la direction divine. Tout ceci ne sont que des symboles qui représentent en fait des lois.
Il y a dans le Ari ces notions de cercles et de droites et pour le Ramh'al, les cercles représentent la providence générale. Le cercle n'est qu'une métaphore et dans cette forme, il y a une égalité entre le centre et tous les points de ce même cercle. De toute part de ce cercle, le rayon est le même. Cela représente la perception générale de Dieu où il voit l'ensemble qui est une vision universelle appelée ''providence générale'' et non la providence particulière sur chaque individu. Cette providence individuelle est liée plutôt à la droite car c'est une perception qui est détaillée où les axes sont alors bien définis. On est alors dans une direction appelée ''conduite droite'', de l'ordre de la rectitude. Prenons comme exemple l'oxygène, il est pour tout le monde, peut importe le degré de rectitude de l'homme, qu'il soit juste et méritant ou méchant et mécréant, il reçoit la même quantité d'oxygène et donc celui-ci provient de cette image appelée ''cercle''. De même, tous les êtres humains sont formés de la même manière, avec des yeux dont leur forme est un globe, ils ont des mains, des pieds identiques...ce sont l'expression des cercles et donc de la providence générale.
L'homme primordiale ''Adam Kadmon'' est une forme première où les Séphirot vont être disposées sous la forme d'un être humain. Les Séphirot étant disposés comme les parties du corps humain, avec deux hémisphères dans son cerveau, le droit et le gauche plus une troisième partie qui correspond au cervelet de l'homme. Il y a aussi des yeux et des oreilles, des mains....que représente cet homme primordial? Pour le Ramh'al, il est le prototype de tout ce qui va exister et qui contient tout, du niveau le plus haut que sont les Séphirot au niveau le plus bas des créatures. Tout est comprimé sous cette forme. Elle représente un idéal qui est le produit de la pensée divine.
Il y a aussi ces images appelés par le Ari Zal ''le grand visage- Arikh' Anpin'' et le ''petit visage- Zéïr Anpin''. Ces appellations sont relatives car il n'y a pas de petit ni de grand dans la spiritualité. Le grand visage signifie la patience ou plutôt la direction divine qui est de l'ordre de la compassion et de l'amour où la direction divine ne réagit pas et ne juge pas. Mais il y a une autre direction qui s'appelle le ''petit visage'' qui correspond à la conduite de la justice. Pour le Ramh'al, le grand visage correspond à une direction de l'amour ou de la compassion alors que le petit visage correspond à une direction faites de rigueurs, c'est la loi, la justice. On pourrait s'arrêter à un des visages mais cela serait une erreur car Dieu contient tous ces visages. Le visage le plus élevé dans la Kabbala est appelé ''l'ancien'', ''ATIK'' qui est le visage principal. L'idée de sa direction est de réparer en sachant que le monde n'a pas été créé complet et parfait. Il va falloir suivre une gradation afin d'atteindre cette perfection car cette gradation fait partie de la pensée de Dieu qui est liée à l'univers et qui est insaisissable dans son essence et dans son anthologie. Mais il y a une pensée qui est saisissable, c'est le but de la création. Ce but va pouvoir être saisi grâce à tous ces visages qui expriment les différents aspects de la création. Le visage principal est ATIK qui va se révéler au moment de l'ouverture des eaux qui représente bel et bien la perfection. En s'ouvrant, la mer qui représente les forces de la nature, montre qu'elle s'arrête pour laisser place à l'homme, au passage de l'homme afin d'arriver à cette finalité qui est représentée par ''Yam Sof'' que nous pouvons traduire ''la fin de la mer''. Le but ultime étant l'adhésion avec Dieu.
Le Ramh'al dans sa recherche, ne se déconnecte pas de la réalité supérieure, son enseignement n'est pas de la philosophie. L'image dans la philosophie n'exprime pas obligatoirement une vérité alors que dans la Kabbala, elle exprime obligatoirement une réalité. La réalité n'est pas loin de la métaphore et de l'image. Il y a une clé qui permet de relier les lois métaphysiques et la nature elle-même. Les lois physiques qui permettent de comprendre et de saisir uniquement par nos sens, peuvent être vraies comme elles peuvent être fausses. Aucune théorie ne peut être considérée comme vraie car on peut la changer selon les conditions des perceptions des sens. La Kabbala est en dehors du temps, dans cette métaphysique en dehors du temps et donc de cette perception des sens. Pour le Ramh'al, la Kabbala est de l'ordre de la prophétie et non de la philosophie car elle correspond à une réalité existentielle et active. La kabbala est dans une dynamique évolutive. Les Séphirot ne sont pas des lois anciennes que les lois physiques ont remplacées, elles sont actives en tout temps et commandent ces lois physiques. Les images dans la Kabbala, sont la manière pour révéler la réalité et ces images ne sont perçues que par la faculté imaginative lorsque celle-ci est liée à la faculté cognitive et intellectuelle. Le prophète doit utiliser ces deux facultés: l'intelligence c'est-à-dire le rationnel mais aussi l'imaginaire. Celui qui n'est pas capable de faire cette association, cette équilibre entre ces deux facultés est un fou ou un super-rationaliste qui ne peut rien nous apprendre des véritables choses bien que le raisonnement soit parfait. On est loin de la véritable réalité car celle-ci ne peut se révéler que par le moyen de la faculté imaginative. C'est la rencontre de la terre et du ciel par le moyen de ce firmament qu'est la faculté imaginative. C'est cette faculté qui va relier les eaux d'en-haut et les eaux d'en-bas. La vérité d'en-haut est la même que celle d'en-bas mais pas dans la même dimension. En haut, c'est la dimension du divin alors qu'en bas c'est la dimension de la création. Cette faculté va réussir à faire le lien entre la réalité de ce monde et le divin, l'union entre la Malkhout (la terre) et le Kéter (le divin).
Rav Mordékhaï Chriqui

Le Ramh'al et son œuvre (4): ''la singularité de la Kabbale du Ramh'al''

le Ramh'al a été perçu comme celui qui a interprété la Kabbala d'une manière allégorique et rationnelle comme si toute son œuvre tournait autour de l'enseignement Lourianique, étant basé sur une partie du Zohar que l'on appelle la ''IDRA RABBA'' et la ''IDRA ZOUTRA'' qui expliquent tout l'enchaînement des mondes divins à partir de la volonté de l'infini jusqu'à la réalité qui s'appelle la création du monde et de l'univers. Ces IDRA expliquent le Tsimtsoum, l'espace primordial qui va permettre à l'infini de concevoir tous les mondes jusqu'à la dernière créature et toute l'histoire jusqu'à la fin des temps. Si nous voyons le Ramh'al uniquement dans cette vision comme interprétateur et commentateur de l’œuvre Lourianique même du Zohar (il a écrit un texte fondateur sur la IDRA RABBA qui s'appelle ''ADIR BAMAROM'' où il explique les visages de Dieu que sont ARIKH' Anpin et Zéïr Anpin jusqu'à amener le monde à sa perfection c'est-à-dire l'éternité) cela n'est qu'un raccourci car l'essentiel de son œuvre se trouve dans un petit opuscule qui s'appelle ''Mahamar sod ayih'oud'' qui parle du mystère de l'unité. Il va expliquer dans ce fascicule l'essentiel ou plutôt la particularité et la singularité de son œuvre magistrale qui est en fait l'unité lui-même et non pas les conséquences de l'épanchement de cette unité qu'elles soient les Séphirot, les principes premiers ou les mondes métaphysiques. Tout ceci pour le Ramh'al est l'expression de l'unité que cela soit les âmes, les anges, les corps humains et ensuite toutes les créatures matérielles. Tout cela ne va être que le moyen à l'unité de s'exprimer complètement jusqu'à arriver à la révélation de l'unité absolue.
Il y a un texte du Zohar qui s'appelle '' je lève mes mains vers le très haut'' où Rabbi Shimon va expliquer quelque chose qu'il ne réexpliquera plus jamais tout au long du Zohar. C'est ce texte qui va servir de base au mahamar ''Sod Ayih'oud'' du Ramh'al qui va expliquer l'inexplicable.
Le Ramh'al ne parle jamais de l'essence divine mais de sa volonté et dans sa volonté, il faut distinguer sa volonté illimitée et sa volonté limitée qui a un but et qui est la création de l'univers ainsi que son histoire. Cette tête insaisissable que décrit Rabbi Shimon, tend vers une volonté qui veut s'extirper ou plutôt se révéler mais avant même de vouloir se révéler, elle fait une marche-arrière comme une pensée qu'un homme veut extraire de son esprit qui reviendrait à son origine n'étant pas capable de se séparer de sa source. Ainsi, cette volonté suprême se met à poursuivre cette tête inconnaissable afin de tirer d'elle une illumination. C'est alors qu'un rideau, un firmament, appelé ''Pargod'' va se déployer entre la tête et la pensée suprême pour permettre la continuité de la volonté comme si le fait de vouloir émaner les principes premiers déclenche une non-volonté ou plutôt un non-désir de la volonté de poursuivre sa tâche et son projet. Ce projet étant d'extraire et d'épancher ce qu'elle doit extraire et épancher. Ce rideau va donc empêcher cette volonté de revenir à sa tête et permettre à cette volonté de poursuivre son épanchement à partir donc de ce rideau. Ce rideau qui sert de frein va quand même permettre de filtrer quelque chose de cette volonté qui va réussir à rejoindre cette tête suprême. Cette volonté essayant de venir sans venir vraiment ''Mati vélo Mati'' mais il va y avoir quelque chose qui va éclore de ce va et vient. De ce va et vient va éclore l'idée des palais (qui ont un rôle dans le changement de la lumière qui est une sorte de salle d'accouchement). Cela va être une continuité de la lumière mais qui ne va pas être du même genre. En d'autres termes, cette chambre est une sorte de transformateur où la lumière s'appelle aussi ''lumière'' où si cela est dans les mondes de la création, cela s'appelle les ''anges'' ou les luminaires, Séphirot qui sont les principes de la création. Mais ces lumières peuvent aussi engendrer des âmes. Tous ces flux se situent dans les mondes inférieurs que l'on appelle les mondes ''B-Y-A'', ''Bérya-Yétsira-Assya'' qui sont les mondes des êtres séparés et qui sont au-dessous du monde de l'émanation, du monde divin de la Atsilout. Le Zohar ne parle pas de ces palais qui sont au nombre de neuf. Ces palais ne sont pas des lumières, ne sont pas des souffles, ne sont pas des âmes et personne ne peut y demeurer. Les lumières qui rejoignent les palais ne sont plus dans le Pargod et commencent à s'extraire et à se révéler grâce justement à ces palais. Alors ces lumières n'adhèrent plus à l'infini ni dans la volonté suprême et ni dans la pensée suprême, elles atteignent sans réellement atteindre. Dans ces palais résident tous les secrets de la foi. Ce sont les palais de l'infini alors que dans l'enseignement du Zohar et du Ari, les palais concernent uniquement les Séphirot de la Atsilout et en particulier la dernière Séphira de la Atsilout qui s'appelle la ''Malkhout'' et c'est là-bas que la Malkhout réside, elle réside dans les palais de la Bérya.
Le palais est un degré qui est inférieur aux émanations divines. Ces palais servent à extraire de ces lumières un autre genre de lumière comme les âmes supérieures qui sont les premières émanations de ces palais. Les âmes inférieures sont d'un monde inférieur qui sont accouchées par ces lumières pénétrantes dans les palais. Si ces lumières pénètrent dans les palais de la Yétsira, ceux-ci vont créer des anges. Ces lumières qui émanent de la Malkhout, la dernière Séphira de la Atsilout vont alors engendrer des créatures séparées. Tout ce qui va être créé ou tout ce qui a un titre d'être séparé ne peuvent se séparer uniquement par l'intermédiaire des palais qui produisent en eux une sorte de semence. Ce n'est que de l'ordre de la symbolique qui est émis par l'émanateur et qui permet ensuite à la lumière de continuer son cheminement et surtout pour pouvoir sortir des êtres séparés qui ne sont pas les Séphirot. Celles-ci sont les émanations et les principes premiers avec lesquelles l'émanateur crée et dirige le monde. Les êtres séparés ne sont pas connectés de la même manière que les Séphirot. Il est vrai que les anges même s'ils respectent d'une manière très méticuleuse la volonté de Dieu, ils sont quand même des êtres séparés. Ils sont branchés malgré tout par un intellect comme le prophète qui atteint le niveau de la prophétie, ne perçoit plus par son intellect naturel mais par un intellect-agent qui agit ou plutôt qui subit comme une sorte de rotor qui fait tourner le moteur. Son âme alors n'est plus dans l'intelligible mais au-delà de celui-ci. Les âmes sont des créatures séparées qui peuvent s'unir au contraire des corps matériels qui eux ne peuvent s'unir qu'ils soient humains, animaux, végétales ou minérales. Ceux-ci n'ont pas la possibilité de s'unir aux Séphirot si ce n'est grâce à l'âme. Car l'âme peut s'élever, ressentir et vivre l'expérience extatique qui lui permet de goûter à la lumière des palais. Dans tous les cas, nous ne parlons que des palais du monde de la création.
Il y a une autre sorte de palais qui ne sert pas à extraire des êtres séparés dont parle le Zohar. Toutes les lumières qui proviennent de la pensée suprême sont appelées ''infini'' ''Eïn Sof''. Même si ces lumières sont des émanations, nous ne sommes pas encore dans les Séphirot tant qu'elles sont au-delà des palais qui est un niveau avant la révélation des Séphirot. Il y a un premier degré qui s'appelle le ''Kéter'' ''la couronne'' au sein même de l'infini qui va diviser cet infini en trois parties: le Kéter, la H'okhma et la Bina. Le Kéter est la pensée suprême qui poursuit la tête qui est au-delà d'elle puis dans un deuxième niveau, elle commence à illuminer mais sans vraiment sortir et au troisième niveau, elle s'habille. La connaissance qui est la H'okhma s'habille elle-même et s'enferme ensuite dans la Bina.
« après que la pensée commence à extraire quelque chose par cette ascension où elle frappe comme une sorte de porte pour revenir, elle ne veut pas continuer car elle est encore dans la H'okhma et donc elle est encore attachée à la pensée suprême. Elle va alors s'habiller dans la Bina». Pour le Ramh'al, la Bina est le Tsimtsoum. De la Bina elle éclaire ce qu'elle doit éclairer pour ensuite donner la possibilité à la H'okhma de s'insérer complètement dans Bina pour ne faire qu'une seule unité. Ceci est le secret du sacrifice ou plutôt du rapprochement. Ce texte du ''sod ayih'oud'' peut se décomposer en cinq parties. La première partie est une tête la plus scellée qu'il soit qui correspond au monde supérieur inconnaissable. La deuxième partie est la volonté de la pensée suprême qui se met à poursuivre sept têtes. Tout à coup cette pensée voit un rideau, un Pargod, pour ne pas que la volonté fusionne de nouveau et ne revienne à l'origine et ne pas permettre tout ce qui va être extrait de rentrer de nouveau dans l'infini, entre autre l'univers et toutes ses créatures. Cependant de ce Pargod va sortir une multitude de flux qui vont former des palais. Troisième partie, les neuf palais constituent un mystère qui ne correspont à rien de ce que l'on connaît, ni les âmes ni les souffles . Ce sont des palais qui ne correspondent pas du tout à ce que l'on connaît, ce sont des palais exceptionnels. Par la frappe de ce retour sur le Pargod, vont se former ces palais. Et ces palais vont permettre à la H'okhma qui est le deuxième niveau de la pensée et qui ne correspond pas à la connaissance connue du monde de l'émanation et donc à la Séphira ''H'okhma'' que nous connaissons mais qui est un niveau que l'on peut appeler H'okhma. Ce degré de la pensée qui s'appelle connaissance va s'habiller maintenant dans la dimension de Bina. Cette dimension de Bina qui signifie ''compréhension'' ou ''discernement'' va engendrer ensuite toutes les Séphirot.
Pour le Ramh'al, les premières Séphirot, les premiers principes sont apparus à partir des palais. Comme dans le monde de la création, il existerait des palais qui permettent d'extraire les êtres séparés, les âmes, les anges et les créatures matériels de même au niveau suprême, il y a des palais pour extraire les Séphirot. Jusqu'à présent, nous n'avons jamais vu de relation directe entre l'infini et les principes premiers. Nous savons que ces principes se définissent par l'infini et sont ses émanations car de la même manière qu'il est impossible de séparer la lumière de sa source qu'est le soleil, on ne peut séparer les Séphirot de sa source qu'est l'infini.
Pour le Ari Zal, la première action de l'infini est de créer l'espace par le Tsimtsoum, les Séphirot qui est appelé H'allal. Cet espace est l'infini qui se retire à partir d'un point central vers l'extérieur en laissant un espace vacant avec un rayon égal de tout côté et qui crée ainsi une sorte de cercle même si l'image de ce cercle n'est qu'une allégorie. Dans cet espace primordial, il y a un un rayon de l'infini qui pénètre et qui va prendre la forme des cercles, un à l'intérieur de l'autre. Et chacune de ces dix cercles vont produire dix cercles et donc chacune des dix Séphirot vont produire dix Séphirot. Tout ceci dans le monde de la Atsilout puis dans le monde de la Bérya, Yétsira et enfin Assya. Ce sont des cercles dans des cercles où tout est englobé. Dans l’œuvre du Ari Zal, il y a vraiment une création, une formation des Séphirot même si nous avons l'impression que celles-ci sont des instruments et non pas des émanations divines. Le RAMAC pose la question: est-ce que les Séphirot sont l'essence même de la volonté infinie de la loi première ou uniquement des instruments créés et donc comment ces ustensiles sont-ils extraits? Il répond que les Séphirot correspondent aussi bien aux émanations divines qu'à des instruments divins.
Cependant seul le Ari Zal va donner une véritable définition du Kéli par la brisure des vases. Mais en fait rien ne se brise, il n'y a qu'une brisure de symétrie d'après le Ramh'al qui interprète le Ari. Il y a quelque chose qui sort et qui est extrait même de la Séphira et qui contient la Séphira. Il y aurait donc un contenant et un contenu. Pour comprendre la création, il faut comprendre qu'à un moment donné, il y a une brisure du divin avec l'origine même de toutes les forces créatrices. Ces forces créatrices correspondent de manière allégorique aux rois de Édom qui représentent les premières forces du monde. Tous les Mékoubalim n'ont parlé de ces forces uniquement après leur séparation de la lumière et qui correspond au monde du chaos, aux Séphirot du chaos où les vases se séparent des lumières. Pour le Ari Zal, on ne peut parler du monde de la Atsilout qu'après le monde des Nékoudim, le monde des points c'est-à-dire après une brisure entre la volonté de l'infini qui est divin et cette volonté créatrice qui est donc le Kéli. Cette brisure signifie simplement une séparation.
Le Ramh'al ne parle pas de brisure, il n'y a aucune brisure et même cette brisure de symétrie va être tellement camouflée dans un mot qui s'appelle ''enveloppe'' où la lumière va s'envelopper. Pour le Ramh'al, l'acte du Tsimtsoum est le troisième acte de l'émanateur et même si dans l'enseignement du Ari Zal, le tsimtsoum nous paraît comme la première étape dans le processus de ''retrait-révélation'' où la création-révélation est engendrée par un retrait qui donne un espace primordial vacant contenant tout ce qui va exister et en premier lieu les principes premiers qui sont sous forme de cercles et ensuite de droites pour qu'à la fin celles-ci vont engendrer ''Adam Kadmon'', la structure appelée ''homme primordial'' et toutes ses ramifications à partir du monde de la Atsilout, de l'émanation. Mais le Ramh'al va aller plus loin dans le ''Sod Ayih'oud'' jusque avant le Tsimtsoum car lorsque l'on parle de l'unité, on imagine quelque chose d'imperceptible, d'inconnaissable, d'insaisissable, au-delà de toute perception de l'esprit, au delà de toute considération. Pour cela dans le Zohar, Rasbi lève les mains au ciel pour montrer qu'il y a une pensée suprême qui veut rejoindre avant même de continuer le projet, elle veut rejoindre l'infini, la source d'où elle vient. Cette idée de retour n'est expliquée par aucun Kabbaliste: le retour de l'origine des principes, des lois anthologiques qui veulent revenir et se fondre dans l'infini. Mais par ce retour, ils vont se trouver devant un mur, un Pargod. Ce Pargod va permettre à des forces (qui ne sont pas encore des Séphirot, qui sont des jets de flux qui veulent revenir, et ne créent pas les Séphirot) de créer des palais. Ces palais qui vont permettre de faire sortir les Séphirot. À ce niveau, nous sommes encore dans la pensée infinie. En parlant et en décrivant ce niveau, le Ramh'al va rendre l'insaisissable, saisissable. Nous sommes à ce niveau dans la voie de la création avant le niveau du prototype de la création qui est la structure première des Séphirot. Nous sommes avant Adam Kadmon. Alors que chez le Ari Zal, lorsque les Séphirot se disposent dans l'espace primordial, elle forme le prototype de toute l'existence. La Torah du Ramh'al est avant même le prototype de la création. Car dès ce prototype on est dans la séparation bien qu'il est interdit de parler de brisure à ce niveau et bien que certains Kabbalistes ont osé parler dans le Tsiltsoum, de ''première brisure'' comme s'il y aurait eu deux brisures. La brisure que tout le monde connaît qui sont les lumières qui sortent des yeux de Adam Kadmon (les lumières de BAN) et qui vont permettre la révélation du monde de la Atsilout, de l'émanation. Avant le Ari Zal, on ne parlait que de ce monde de l'émanation et même pas de Adam Kadmon. C'est le Ari Zal qui nous a fait monter dans le degré de la connaissance jusqu'à Adam Kadmon qui est le monde de l'éternité. Car ce n'est qu'au niveau des yeux de Adam Kadmon que vont se créer les mondes comme il es dit ''et Élokim a vu...'' qui symbolise la vision vers l'extérieur, vers l'autre qui sont les Séphirot dont le livre de la création et le livre du Zohar parlent dans leur ensemble. Il n'y a que dans quelques passages où la structure de Adam Kadmon est étudié. Alors que le Ramh'al parle avant même cette structure primordiale. Et c'est cela la Torah du Ramh'al où il enseigne ce Pargod qui tend vers le ''avant''.
Avant la fragmentation de la lumière en dix principes au moment du Tsimtsoum, il y a lieu d'accoucher, de faire sortir, d'extraire. Si le Kéter qui est en fait le penchant de la volonté d'avant le Adam Kadmon. Ce n'est qu'au niveau du troisième degré qu'est Bina qui correspond à l'enveloppe de la lumière qui va correspondre aux palais qui est la possibilité d'extraire comme une mère qui enfante.
Cette lumière avant même le prototype que le Ramh'al appelle le ''fil du Eïn Sof'' va être le fil même de l'histoire avant même les Séphirot. Car dans les Séphirot on est déjà après l'infini mais dans l'infini lui-même, il y a donc une histoire qui se passe. Elle se passe en trois étapes: 1/ des lumières qui s'extraient mais qui ne veulent pas s'extraire car il y a une volonté de retour qui veut s'unir à la source. 2/ il y a des éclaboussements par cette frappe sur ce mur qui va engendrer les palais de l'infini 3/ la traversée des lumières dans ces palais qui va révéler Adam Kadmon. Cet Adam Kadmon va être considéré comme les sept Séphirot inférieures et au-dessus sont constitués les trois étapes comme un fil de lumière infini qui sont les trois premières Séphirot supérieures.
En vérité, ce désir de retourner à la source de l'unité va engendrer des palais qui vont eux-mêmes engendrer les Séphirot qui vont créer Adam Kadmon qui de ses yeux, la création va arriver à matérialisation. En fait ces palais ne correspondent pas à des salles d'accouchement mais à des salles d'unification.
Il est vrai que le UN n'est jamais affecté mais il va engendrer des forces qui vont se séparer de cette unité.
Dieu a créé ces flux pour qu'ils reviennent à lui et non pour rester séparés de lui. C'est le retour des êtres séparés dans le UN qui est intéressant chez le Ramh'al. Mais cela passe par des étapes qui sont les palais de la création puis les palais de l'émanation pour enfin retourner dans les palais de l'infini. Le désir de revenir a été prédisposé avant même le désir de partir, de créer, de s'extraire. On ne peut comprendre l'unité que par la proximité et l'adhésion à cette unité, à ce retour vers l'infini. La spécificité de l'œuvre du Ramh'al n'est pas dans la création mais dans le retour de la création à l'unité.
Rav Mordékhaï Chriqui

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