dimanche 4 mars 2018

Paracha-Ki Tissa-Le veau d'or ou le règne du multiple



Paracha ''Ki Tissa'' 

''Le veau d'or ou le règne du multiple d'or''

« ils se dépouillèrent des pendentifs d'or qui étaient à leurs oreilles et les apportèrent à Aharon...» de cet or, est sorti un veau en or bien que cela n'était pas l'intention de Aharon. Pour quelle raison, après avoir vu les grands miracles de la sortie d’Égypte, les enfants d'Israël ont-ils fait le veau d'or? 
Ce peuple qui vit le divin au quotidien, recherche pourtant à s'en échapper! L'idolâtrie étant le premier interdit des dix paroles reçues au mont Sinaï! En fait ce peuple ne voulait pas remplacer Dieu mais il voulait remplacer Moshé (car il pensait qu'il était mort), l'intermédiaire entre Dieu et lui. Car pour le peuple d'Israël, Dieu nous a fait sortir d’Égypte par l'intermédiaire de Moshé! ''nous avons besoin de forces divines (Élokim) non pas pour remplacer Dieu mais pour pouvoir contenir cette énergie divine. Les enfants d'Israël ne recherchaient pas vraiment un dieu, un dieu qui donne la vie, un dieu qui donne la mort...un dieu qui est la souveraineté mais un nouveau Moshé pour leur montrer leur chemin. En soi, cette recherche n'est pas interdite car de tout temps, les rois, les prophètes et les maîtres en Torah ont toujours dirigés le peuple d'Israël. Qu'est-ce qui est alors interdit dans cet intermédiaire dirigeant? En vérité l'intermédiaire n'est pas nécessaire, il peut être là comme il peut ne pas être là. Moshé lui-même n'était pas nécessaire à la révélation divine comme il le dit lui-même à Dieu: « envoie un autre envoyé».
Au moment de la faute du veau d'or, Dieu dit à Moshé « le peuple s'est très vite détourné du chemin» il s'agit du chemin de l'unité. C'est cette voie qui faisait peur au peuple d'Israël. Car dans cette voie, tout est soumis au UN, tout est contrôlé par le UN. L'homme préfère être gouverné par plusieurs forces et par cela, s'arranger avec elles car en vérité, on ne croit pas à ces forces mais plutôt à notre propre libre-arbitre qui va jouer avec elles. On ne croit pas à une origine primordiale à toutes nos pensées, paroles et actes, ceux-ci ont pour origine notre volonté qui est lui-même un intermédiaire avec qui, on peut s'arranger, c'est notre Moshé. Mais avec la cause originelle, on ne peut s'arranger car elle est imperceptible, imprévisible. Cette essence de Dieu leur échappe ou plutôt ce principe de l'éternité. Cette immuabilité fait peur au peuple d'Israël car il lui est impossible de coexister avec Dieu. C'est soit Dieu soit nous! Nous acceptons que Dieu soit dans le ciel mais surtout qu'il y reste et nous, nous le servirons en bas de manière intègre mais de nous-mêmes, par notre propre volonté.
Et voilà que Dieu après la faute a voulu leur donner un ange pour leur montrer leur chemin. C'est la voie de la dualité où Dieu va être perçu en Dieu de la subsistance, en Dieu de la guerre...où il n'y a pas de place à l'essence divine dans la vie. Les anges vont alors devenir les intermédiaires qui eux, vont accomplir la volonté divine dans ce monde. Mais Dieu n'a pas fait sortir le peuple d'Israël d’Égypte pour être comme tous les peuples. Chaque peuple a effectivement son dieu, son ange qui le dirige et c'est le divin qui se représente sous des formes différentes, sous différentes qualités, c'est la notion de Élokim dans toute sa force qui va se réaliser en eux. Les visages de l'amour et de la rigueur vont alors se matérialiser dans chacun de ces peuples. C'est ce que l'on appelle les ''attributs divins''. Mais en aucun cas ces qualités vont représenter l'être suprême qui est en lui-même indéfinissable, qui est appelé l'insaisissable le ''néant'' et qui n'est définit que par un terme négatif le ''sans-fin''. Et c'est justement cette dimension du ''sans-fin'' qui a troublé l'esprit du peuple d'Israël. Car l'homme a l'incapacité de supporter cette dimension que l'on appelle le ''Eïn Sof'', le ''Sans-Fin''. Cette expression divine de devenir eux-mêmes éternels (car le but du don de la Torah était que leur corps s'unisse à leur âme) est la véritable dimension de la vie. Mais ils n'ont pu l'intégrer en eux car ils n'ont pas encore atteint la complétude. Il leur manquait ce laps de temps de 6 heures qui représente les six extrémités du monde. S'ils avaient attendu, ils auraient intégré la totalité de l'ensemble de ce que l'on appelle la ''substance'' et dans ce cas-là, ils auraient pu vivre et accéder à cette éternité.
Les notions de quantité et de qualité sont en fait deux termes qui se complètent et ne sont pas antinomique car dès que l'on parle de qualité, il y a toujours la notion de quantité qui se greffe à elle. L'essence représentant la qualité et la substance, la quantité. Ces deux notions sont des définitions liées à la particularité des êtres. Les êtres créés vont faire automatiquement une distinction entre ces deux termes philosophiques. Ce sont deux termes qui peuvent définir le monde de la dualité, la forme pour la qualité et la matière pour la quantité. Nous savons que dans le veau d'or, il y a cette idée de la forme. Mais par rapport au divin, ces qualités ne sont que les conséquences de son épanchement car à ce niveau, il n'y a ni forme ni quantité. Lorsque l'on parle des qualités divines, cela ne va pas définir l'essence de Dieu mais sa volonté. Car en vérité, son essence nous échappe. Le peuple d'Israël avait conscience que l'essence divine lui échapperait tout le temps et qu'il ne pourrait jamais parler de son essence réellement. Il lui fallait une représentation car la parole divine était insaisissable, il fallait créer un rapport, un point de passage entre l'infini et le fini. C'est cette relation entre le fini et l'infini où Dieu est lié avec le monde et son histoire que le peuple d'Israël voulait saisir. Ce point et cette dimension, les Kabbalistes l'appelle Élokim ou le petit visage, Zéïr Anpin. L'erreur est de percevoir ce point comme l'essence divine mais en vérité le petit visage comme le grand visage (Arikh' Anpin) ne sont que des volontés de Dieu qui s'expriment à travers une parole et c'est cette parole qui peut être saisie et même visible par le prophète. La descente dans le chariot céleste est cette perception extra-sensorielle où le prophète peut saisir des choses. Ces visions de choses matérielles expriment une volonté mais en aucun cas, cette vision ne représente l'émanation divine, l'essence même de la parole. Elle ne représente seulement qu'une expression puisque tout a été créé par la parole donc chaque chose dans ce monde a une représentation métaphysique en dehors de la forme et de la matière. La véritable difficulté est de comprendre cette transposition de la parole: comment la parole prend forme, crée la matière? Comment garder l'unité et l'essence de Dieu et ses différentes expressions qui sont saisies par la matière et qui sont les ''visages'' de Dieu? Car tous les événements de ce monde expriment bel et bien une volonté spécifique divine. Celui qui sait interpréter réellement les événements de l'histoire est dans la voie prophétique et initiatique. Même si l'homme possède en lui un élément divin qui est de l'ordre de l'éternité et qui lui permet d'avoir ce rapport avec l'éternité, il ne peut se relier aux qualités divines par la perception sensorielle. Car cette perception des sens nous fait entrer dans le monde de la forme et de la quantité, ce que la Kabbale appelle le ''domaine public'', le monde de la pluralité des forces, le dieu Élokim étant le maître de toutes ces forces. Il y a effectivement des forces divines distinctes, le corps lui-même étant constitué de ces 613 parties divines distinctes. La propriété publique est cette dimension où la pluralité, la quantité domine. C'est cette volonté de vivre dans la pluralité qui a fait dire au peuple d'Israël ''fais nous un dieu qui nous montre notre chemin.''
c'est le mystère des palais qui va permettre de percevoir la transformation de la volonté divine unique en qualités et quantités spécifiques. Pour entrer dans cette voie de l'unité, il faut faire abstraction même des qualités divines. Et sans cette abstraction même si ce n'est que dans une optique spirituelle, on reste toujours dans la dualité, dans la conduite du jugement de Élokim. Dieu dans cette perception est un dieu politique qui va s'occuper des affaires de la cité. Par l'unification avec Dieu, on pourra arrêter de donner une forme et une qualité aux choses et aux événements qui surgissent devant les portes de notre perception et ceci passe par la construction de ces palais qui vont nous permettre de rejoindre le point de passage vers l'éternité de l'unité.

  Rav Mordékhaï Chriqui (5777)
Retranscription Rav Michael SmadjaPublie par la Source des sagessesVous pouvez partager ce texte à condition d'en respecter l'intégralité et de citer la source: http://la-source-des-sagesses.blogspot.fr/

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire